Discogs, Vinted, Leboncoin : les disquaires face à la jungle du marché secondaire

En 2025, acheter un vinyle ne passe plus nécessairement par un disquaire. Une simple recherche sur Discogs, Vinted ou Leboncoin suffit pour dénicher une rareté, un pressage original, ou une édition usée à prix symbolique. Le marché secondaire est devenu massif, fluide, algorithmique. Et pour les disquaires indépendants, il redéfinit profondément la donne.

Un marché parallèle en pleine expansion

Selon la Fédération des Disquaires Indépendants, plus d’un disque sur deux achetés en France en 2024 était d’occasion, tous canaux confondus (1). Ce chiffre inclut les brocantes, les vide-greniers, mais surtout les plateformes numériques : Discogs est devenu la première base de données mondiale, avec plus de 16 millions de références actives. Vinted, historiquement axé mode, connaît une croissance fulgurante sur le segment vinyle depuis 2023 (2).

Pour les collectionneurs comme pour les acheteurs occasionnels, ces plateformes offrent une accessibilité sans filtre : comparaison de prix, notation des vendeurs, expéditions internationales… Une puissance logistique que peu de disquaires peuvent concurrencer.

Une concurrence frontale… et biaisée

Le problème ? Les prix affichés en ligne ne reflètent pas toujours la réalité. Entre états mal évalués, copies non vérifiées, et frais cachés, le “meilleur prix” est souvent un leurre. Mais cela alimente une perception faussée chez les clients : pourquoi payer 18 € chez un disquaire quand le même disque semble à 9 € sur Discogs ?

Résultat : les disquaires doivent sans cesse justifier leur valeur ajoutée. Vérification des états, conseils personnalisés, garantie de qualité, expertise musicale… Autant d’éléments invisibles sur un écran, mais déterminants dans l’expérience d’achat. Certains jouent la carte de l’événementiel (showcases, DJ sets, avant-premières), d’autres celle du catalogue curaté, avec des sélections serrées, pensées comme des playlists physiques.

Entre adaptation et redéfinition du métier

Face à cette pression, de nombreux disquaires se sont professionnalisés sur le marché secondaire lui-même : vente croisée sur Discogs, boutique miroir sur Vinted, présence active sur les groupes Facebook de collectionneurs. Ce mouvement oblige à jongler entre physique et numérique, local et mondial.

Mais tous ne suivent pas. Certains dénoncent une perte de sens, une spéculation permanente, une érosion du lien client. Car au fond, ce que beaucoup disquaires défendent, ce n’est pas qu’un stock : c’est une scène, une culture, une manière de faire exister la musique.

Sources

(1) Fédération des Disquaires Indépendants – Baromètre 2025
(2) GfK / Kantar – Marché de la seconde main culturelle en ligne, janvier 2025
(3) Discogs Data Trends Report – Édition Europe 2024
(4) Enquête terrain – Réseau IndéSon / Zone Franche, mars 2025

Jean-Baptiste P.

Je m’appelle Jean-Baptiste, étudiant en lettres (mais je vous jure, je lis aussi autre chose que des classiques poussiéreux). J’écris sur ce qui me fait lever les yeux, tendre l’oreille ou froncer les sourcils : un album, un bouquin, une idée qui dérange.
Sur Pangee, je cherche pas à tout savoir — juste à mieux comprendre, en écrivant comme on parle à un pote un peu curieux. Et si je peux glisser une référence à Bashung ou Annie Ernaux au passage, c’est encore mieux.

Suivant
Suivant

L’essor des micro-maisons d’édition en France